dimanche 21 avril 2024

La chute de l'Empire Inca ...

L'Empire Inca (appelé Tahuantinsuyu ou Tahuantinsuyo en "quechua", langue des Incas), à son apogée au début du XVIème siècle, dominait les Andes et la côte Pacifique de l'Amérique du Sud. Cette civilisation, remarquable par ses compétences administratives et ses pratiques agricoles avancées, était devenue l'une des plus sophistiquées des Amériques précolombiennes.

L'arrivée des conquistadors espagnols en 1532 en précipita la chute. En quelques années, les Incas succombèrent face à la supériorité technologique et militaire des Espagnols. L'empire s'effondra, laissant place à la domination coloniale espagnole. La culture, la langue, la religion incas furent réprimées et la population décimée. Comprendre la chute de l'Empire Inca est essentiel pour saisir l'histoire de l'Amérique du Sud et les défis contemporains. Ce petit article se propose précisément d'examiner les causes de cette chute, les tactiques des conquistadors et les effets sur les peuples autochtones. Cela afin de mieux comprendre les dynamiques qui ont façonné cette région du monde.

I. L'Empire Inca au début du XVIème siècle
A cette époque, l'Empire Inca s'étendait depuis le Sud-Ouest de l'actuelle Colombie jusqu'au milieu de l'actuel Chili au Sud, en englobant la quasi-totalité des territoires actuels du Pérou et de l'Équateur, ainsi qu'une partie importante de la Bolivie et de l'Argentine du Nord-Ouest. L'ensemble représente une superficie totale de 1 800 000 km2, soit plus de trois fois celle de la France d'aujourd'hui.
Pour contrôler leur Empire, les Incas construisirent plus de 45 000 kilomètres de routes (voies principales et secondaires), toutes convergeant vers la capitale Cusco. Ce système routier, 
connu sous le nom de "Qhapaq Ñan", fut développé au fur et à mesure que l’Empire s’étendait. Il était composé de deux axes Nord-Sud principaux, l’un longeant la côte de l'Océan Pacifique et l’autre la Cordillère des AndesCe réseau permettait de se déplacer rapidement à travers l'Empire, facilitant le commerce, la communication (messagers à pied appelés "chasquis") et le contrôle militaire. Les routes étaient construites avec une grande précision et comprenaient des ponts, des tunnels et des escaliers pour traverser les terrains montagneux et difficiles.

En 1530, la population de l'Empire des Incas était estimée à environ 12 millions d'habitants. La majorité de la population vivait dans les régions montagneuses des Andes et dans la jungle, bien que de grandes villes et des centres administratifs aient également existé le long de la côte. En réalité, le territoire se présentait plutôt comme une mosaïque de groupes ethniques. Chacun, avec sa propre langue (30 langues différentes au total), étant raccordé, souvent au prix de conflits sanglants, au pouvoir central de Cusco (cette singularité allait avoir un poids extrêmement important dans la suite des événements). Une situation semblable à ce que sera, des siècles plus tard, l'URSS avec ses "Républiques hétérogènes" maintenues sous le joug du pouvoir central à Moscou.

L'armée inca était l'une des plus puissantes et des mieux organisées de son temps. Elle était composée de soldats professionnels et de conscrits, répartis en unités régulières et spéciales. Elle disposait d'un armement composé notamment de lances, de massues, d'arcs et de flèches, ainsi que d'armures en coton rembourré.

L'Empire était riche en ressources naturelles, telles que cuivre, or, argent et étain. Par ailleurs, les Incas étaient également des agriculteurs habiles et avaient développé des systèmes d'irrigation sophistiqués favorisant des cultures telles que le maïs, les pommes de terre (2 300 espèces différentes) et le quinoa. Ils élevaient également des lamas et des alpagas pour la viande, la laine et le transport (les Incas ne connaissaient pas les chevaux, autre détail très important pour la suite des événements), .
Les Incas réalisèrent des merveilles architecturales en utilisant des techniques impressionnantes, avec leurs constructions de citadelles de montagne comme 
Machu Picchu et leur capitale Cusco. Leur maçonnerie en pierre, construite sans utiliser de roues ni d'outils en fer, était si précise que même la lame d'un couteau n'aurait pu passer entre les blocs mégalithiques (cf. ci-contre). 

Au sein de leur vaste royaume, les Incas établirent l’une des civilisations les plus avancées de l’hémisphère occidental. Leur structure administrative et politique était brillamment organisée autour du dirigeant suprême, le "Sapa Inca" (littéralement "Seul Inca, l'Unique Seigneur" ou encore "Inca Suprême" ou plus simplement Empereur), qui supervisait une économie planifiée et des gouverneurs de province appelés "Tupac". 

Ainsi doté, l'Empire Inca avait prospéré pendant plusieurs siècles, pour atteindre son apogée au début du XVIème.


II. Premier contact avec les Espagnols

C’est lors de deux expéditions, sur les côtes de l’Équateur (1524-1525) et du Pérou (1526-1528) actuels, qu'eurent lieu les premières rencontres directes entre les Incas et un groupe de conquistadors espagnols, sous les ordres de Francisco Pizarro et Diego de Almagro. Ces rencontres furent souvent des sources de malentendus et de tensions croissantes entre les deux côtés.
Dès le début, les Incas considérèrent les Espagnols avec un mélange de confusion, de curiosité et de dédain. Ceux-ci avaient une apparence et une culture totalement étrangères aux Incas, qui considéraient leur pays natal dans les Andes comme le centre du monde. Mais au départ, ces guerriers barbus en armes, "venus de la mer", ne semblaient pas constituer une menace.

Les Espagnols trouvèrent de l'or, de l'argent et des pierres précieuses. Très vite les relations se tendirent et la méfiance s'installa, après que les Espagnols aient commis des actes de pillage et de violence contre les populations côtières incas à partir de 1527 (notamment des actes de torture et des passages à tabac). Devant l'hostilité redoublée des indigènes, les Espagnols cédèrent du terrain et décidèrent de retourner chercher des renforts en vue d'une nouvelle expédition. 

Durant ces deux expéditions, les conquistadors furent des foyers de transmissions de différents microbes (variole, rougeole, etc.), ce qui allait avoir un impact considérable sur la suite des événements (1).

III. Lutte pour le pouvoir entre Huáscar et Atahualpa

Dans les années 1520, c'est l'Empereur Inca Huayna Cápac qui était au pouvoir. Huáscar et Atahualpa (cf. photo ci-dessous, respectivement de gauche à droite) étaient deux de ses nombreux fils: le premier (Huáscar) étant un fils légitime (sa mère était l'épouse principale de Huayna Cápac), le second (Atahualpa) étant un fils illégitime (sa mère était l'une des concubines de Huayna Cápac).
Lorsque Huayna Cápac mourut en 1527 (1), sans avoir pu auparavant désigner celui de ses fils qui lui succèderait, c'est Huáscar qui fut désigné par la noblesse de Cusco (la capitale de l'Empire Inca) comme "Sapa Inca" (Empereur). Atahualpa, qui était alors Gouverneur de la Province de Quito, contesta la légitimité de Huáscar en tant qu'Empereur. Les deux frères commencèrent alors à rassembler des armées pour se battre pour le pouvoir.

Il s'ensuivit une guerre civile qui dura plusieurs années. Atahualpa finit par vaincre Huáscar lors de la bataille de Quipaipan, en 1532. Huáscar fut capturé et emprisonné. Ses partisans furent massacrés et il dut assister, impuissant, à l'assassinat de ses 80 enfants et au viol de ses épouses (la polygamie était de mise chez les Incas). Il subit des sévices humiliants en attendant qu'Atahualpa, qui avait été couronné Empereur (Sapa Inca) statue sur son sort. Malheureusement, cette lutte sanglante et sans merci laissera l'Empire divisé et contribuera beaucoup à sa perte.

Comme si cela ne suffisait pas, les Incas furent à l'époque également frappés par une vague d'épidémies de maladies "européennes", comme la variole, qui s'était propagée depuis l'Amérique Centrale, encore plus rapidement que les conquistadors eux-mêmes. C'est l'une de ces maladies qui tua probablement Huayna Capac et, dans certains endroits, un pourcentage stupéfiant de 65 à 90 % de la population mourut de cet ennemi invisible.

IV. La troisième expédition de Francisco Pizarro

Le règne d'Atahualpa avait très mal commencé. Son autorité était contestée par ses rivaux et son peuple avait été durement touché à deux reprises: tout d'abord par la désastreuse guerre civile et ses millions de morts (cf. paragraphe précédent) et ensuite par une très violente épidémie de variole qui avait ravagé les populations andines.

Ce règne allait être également de courte durée. En effet, dès 1532, des conquistadors espagnols dirigés par Francisco Pizarro revenaient au Pérou avec la ferme intention de conquérir tout ce qui pouvait l'être.

A. Tout d'abord, quelques mots sur Pizarro

Francisco Pizarro naquit vers 1475 à Trujillo, en Espagne. Après une enfance particulièrement dure (il était même analphabète), il décida de rejoindre le camp des conquistadors et arriva en Amérique du Sud en 1502.
Il participa à plusieurs expéditions, notamment celles d'Alonso de Ojeda (1509,
Golfe d'Urabá), de Vasco Nunez de Balboa (1513, découverte du Pacifique) et surtout de Gaspar de Espinoza (1515-1517, Costa Rica) où il obtint la charge de Capitaine. En 1519, il devint Premier Magistrat de la ville de Panama qui venait d'être fondée.

C'était un homme particulièrement cruel et rusé, très largement motivé par sa soif d'or et de richesses. En juillet 1523, il apprit l'existence d'un territoire aux richesses énormes en or et en argent, situé au Sud de la côte Ouest colombienne. Inspiré par le remarquable succès d'Hernan Cortès, qui, avec seulement quelques conquistadors, avait réussi à vaincre l'Empire Aztèque, il opta pour une alliance avec deux autres individus: le prêtre Hernando de Luque et le soldat Diego de Almagro. Ensemble, ils entreprirent la conquête de ce territoire censé regorger de fabuleuses richesses.

Leur première expédition (1524-1525) se solda par un échec : leur navire endommagé et confrontés à des privations et à l'hostilité des populations de l'actuel Équateur, les Espagnols furent contraints de faire demi-tour. En revanche, leur deuxième expédition (1526-1528) fut fructueuse: Pizarro et ses compagnons atteignirent la région de Tumbes, dans l'actuel Pérou, où ils réussirent à établir des contacts avec une population récemment soumise par les Incas et, surtout, à découvrir d'importantes quantités d'or, d'argent et de pierres précieuses. (cf. paragraphe II ci-dessus). Le fabuleux "eldorado" tant convoité existait bel et bien. Il convenait donc de se renforcer (hommes, armement, etc.) afin de le conquérir.

C'est ainsi que, durant mars 1529, Pizarro se rendit à Tolède (Espagne) pour plaider sa cause auprès du Roi Charles Quint. Celui-ci lui conféra tous les pouvoirs politiques et militaires sur tous les territoires qu'il pourrait conquérir. Porteur de cette "feuille de route", Pizarro retourna à Panama, en 1530, accompagné de trois de ses frères.

B. Retour de Pizarro au Pérou

En 1532, Pizarro retourna donc au Pérou. Il débarqua sur les côtes péruviennes, dans la région de Tumbes, à la tête d'un groupe de 168 soldats (dont 62 cavaliers) particulièrement aguerris et solidement armés (avec notamment de l'artillerie).
Il s'informa très vite de la récente guerre civile et de ses tragiques conséquences: immenses pertes en vies humaines, capture de
Huáscar et antagonisme profond entre les peuples de Quito et Cusco. Il apprit surtout que le nouvel Empereur Atahualpa se trouvait à Cajamarca, une ville pas trop éloignée de la région de Tumbes.

Les relations avec les populations locales s'améliorèrent, au point de trouver de nouveaux alliés pour le projet qu'il commençait à murir. L'approvisionnement devenait plus aisé et les richesses espérées se révélaient toujours plus consistantes: petits lingots d'or, étoffes précieuses, etc.

Pizarro prit alors la décision d'abandonner la côte et d'obliquer vers l'intérieur, à l'assaut des Andes et à destination de Cajamarca.

C. Le massacre du 16 novembre 1532 à Cajamarca et la capture d'Atahualpa

Le trajet dura sept mois dans des conditions difficiles, à cause du franchissement de la Cordillère des Andes et d'une résistance de plus en plus croissante de la part des populations autochtones. Le 15 novembre 1532, Pizarro arriva enfin à Cajamarca. Cette ville, située dans les hautes terres du Pérou actuel, était un lieu de repos et de villégiature pour l'Empereur Atahualpa.

Une fois sur place, Pizarro réalisa l'infériorité numérique de sa troupe par rapport à l'armée qui accompagnait Atahualpa. Il ne disposait effectivement que de 168 hommes, bien que ceux-ci aient l'avantage d'être équipés d'armes à feu, de canons, de lances/épées en acier, d'arbalètes, d'armures en métal et de chevaux, autant de choses inconnues des Incas.

Pizarro décida alors d'avoir recours à un véritable traquenard. Il envoya des émissaires à Atahualpa, invitant ce dernier à rencontrer son groupe dans la ville. Atahualpa accepta, considérant probablement les Espagnols comme des étrangers curieux et sans importance.

Le 16 novembre, Atahualpa arriva donc à Cajamarca avec une suite de plusieurs milliers de personnes, pour la plupart désarmées, conformément aux conditions fixées par Pizarro. Cependant, une fois que le "Sapa Inca" et son escorte furent entrés dans la ville, les Espagnols (qui s'étaient dissimulés dans différentes bâtisses) lancèrent une attaque surprise. Ils ouvrirent le feu avec toutes les armes dont ils disposaient et chargèrent avec leurs chevaux, semant la panique et la confusion parmi les Incas.


La scène fut terrible. Les Incas, qui n'avaient jamais vu d'armes à feu auparavant, furent terrifiés par leur bruit et leur puissance. Les chevaux, inconnus dans les Amériques à l'époque, ajoutèrent à la panique, car les Incas pensaient que les cavaliers et leurs montures ne faisaient qu'un. Ils furent découpés en morceaux par les terribles épées des Espagnols. Ceux-ci se livrèrent à un véritable carnage. Ils massacrèrent des milliers de gens désarmés, sans perdre eux-mêmes un seul homme.

Au milieu de la confusion, Atahualpa resta impassible sur sa litière d'or, alors que ses porteurs étaient massacrés; dès que certains d'entre eux tombaient, d'autres se précipitaient pour les remplacer afin de maintenir Atahualpa dans sa dignité de "Sapa Inca". Les Espagnols finirent par se saisir de lui et le faire prisonnier (il fut sauvé de la mort, des mains d'un soldat espagnol, par Pizarro en personne).

Mais cela ne sembla pas suffire aux Espagnols qui, jusqu'à la nuit tombée, pourchassèrent les Incas dans toute la vallée, laissant derrière eux des milliers de cadavres dont une grande partie de la noblesse et de l'élite impériale venues en paix.

D. Atahualpa en captivité

Après sa capture lors du massacre de Cajamarca, Atahualpa fut retenu prisonnier par les Espagnols. Bien qu'il soit leur otage, ceux-ci le traitèrent avec un certain respect, reconnaissant son statut d'Empereur et espérant tirer profit de sa captivité. Etant entre leurs mains, il était pour eux la meilleure garantie contre toute attaque des armées des généraux qui lui étaient restés fidèles.

Atahualpa comprit rapidement que les Espagnols étaient motivés par l'or et les richesses. Il offrit donc à Pizarro l'équivalent en or du volume de sa cellule (11,80 m de long pour 7,30 m de large et 3,1 m de haut) et une quantité double en argent, en échange de sa libération (cf. ci-dessous, photo de la prison). Pizarro accepta l'offre, voyant là une occasion d'acquérir une grande quantité de richesses mais sans pour autant avoir l'intention de tenir parole. C'est ainsi que, depuis tout l'Empire et notamment de Cusco, arrivèrent des convois chargés d'énormes quantités d'objets en or et en argent: vaisselle, seaux, vases, masques et autres objets (cf. petit échantillon dans la colonne droite de ce Blog, partie haute).


Pendant sa captivité, Atahualpa resta en contact avec ses sujets et continua à gouverner l'Empire autant que possible. Il ordonna même l'exécution de plusieurs de ses rivaux politiques et notamment celle de son frère Huáscar, tout cela dans le but d'éliminer toute menace potentielle à son autorité et de consolider son pouvoir sur l'Empire.

Malheureusement, l'exécution de Huáscar eut pour conséquence de renforcer encore davantage les dissensions et la rancœur entre "huáscaristes" (partisans de Huáscar) et "atahualpistes" (partisans d'Atahualpa), facilitant ainsi l'enracinement du pouvoir espagnol dans un pays divisé.

Concernant la rançon elle-même, elle fut entièrement réglée avec livraison des volumes d'or et d'argent escomptés, soit 6 087 kg d'or fin et 11 793 kg d'argent (3). Atahualpa avait donc tenu parole mais, malheureusement, Pizarro n'allait pas respecter la sienne.

E. L'exécution d'Atahualpa et ses conséquences

En fait, Pizarro révéla sa véritable nature impitoyable. Insinuant que les généraux d'Atahualpa ne lui obéissaient plus, et en dépit de la parole qu'il lui avait donnée, Pizarro estima qu'il n'avait aucun intérêt à le conserver en vie. Il l'accusa donc de la mort de Huáscar, de polygamie, de mariage incestueux et de trahison envers les Espagnols, puis le fit juger par un tribunal espagnol.

Atahualpa fut condamné à mort. Ayant demandé à être baptisé pour ne pas être brûlé vif, châtiment terrible qui aurait voué le "Fils du Soleil" au néant (4), il fut donc condamné à être garrotté.


Avant d'être supplicié, Atahualpa demanda à Pizarro de veiller sur ses enfants (ce qu'il ne fera pas). L'exécution eut lieu le 26 juillet 1533, alors que la nuit était déjà bien avancée. Son corps fut pendu sur la place jusqu'au lendemain. Il fut ensuite transporté dans la maison faisant office d'église, puis enterré comme un Chrétien ...

Lorsque Charles Quint, Roi d'Espagne, apprit l'exécution d'Atahualpa par Pizarro et ses hommes, il fut profondément choqué et consterné. Monarque catholique et dévot, il considérait en effet qu'il avait la responsabilité de protéger les peuples indigènes des Amériques et de les convertir au Christianisme. Il croyait également que les dirigeants indigènes devaient être traités avec respect et considération, en tant que souverains légitimes de leurs terres. Il ordonna aussitôt une enquête qui révéla que Pizarro et ses hommes avaient effectivement commis de nombreux abus et atrocités contre les Incas, y compris le massacre de Cajamarca et l'exécution d'Atahualpa.

Suite à cela, Charles Quint promulgua en 1542 les "Nouvelles Lois", qui interdisaient l'esclavage des Indiens et protégeaient leurs droits en tant que sujets de la Couronne 'Espagne. Bien que les "Nouvelles Lois" aient été, par la suite, largement ignorées et violées par les colons espagnols, elles reflétaient bien l'attitude éclairée de Charles Quint envers les peuples indigènes des Amériques (5).

Pour Pizarro et ses conquistadors, Huáscar et Atahualpa n'étant plus, la conquête du Pérou pouvait réellement commencer.

V. La poursuite de la conquête de l'Empire Inca (1533-1572)

Pizarro installa tout d'abord l'un des frères d'Atahualpa, Túpac Huallpa, comme nouvel Empereur ("Sapa Inca") fantoche, puis décida d'abandonner Cajamarca pour aller à Cusco, la Cité Impériale des Incas, distante d'environ 1 000 km à vol d'oiseau. Cette ville, située dans les Andes péruviennes à 3 400 m d'altitude, dont on disait qu'elle regorgeait d'or et de richesses de toute sorte.

Un convoi impressionnant quitta donc Cajamarca, le lundi 11 août 1533, très tôt le matin. Cela sous la forme d'une longue colonne de plusieurs kilomètres, constituée de soldats et cavaliers espagnols (400 hommes environ), d'esclaves noirs (venus du Nicaragua), de porteurs indigènes (chargés de transporter notamment l'or et l'argent), de lamas (à la fois comme bêtes de bât et ressource en viande), de serviteurs, de concubines et de la suite du nouvel Empereur Túpac Huallpa.

Il y avait aussi un nombre important d'auxiliaires indiens constitués de guerriers huáscaristes ralliés aux Espagnols. Viendront s'y ajouter d'autres groupes ethniques soumis par les Incas, dont les Cañaris, les Chachapoyas et les Huancas (6).

Il y avait enfin un prisonnier de première importance, le général altahualpiste Chalcuchímac. Celui-ci avait été capturé à Cajamarca et soumis à d'atroces tortures. Pizarro lui avait néanmoins épargné la vie, conscient de détenir là un très précieux otage.

A. La longue marche vers Cusco 

Pendant des mois, la progression du convoi en direction de Cusco fut lente et difficile: sommets à franchir pouvant dépasser les 4 800 m d'altitude, marches périlleuses (le long de précipices), conditions climatiques pénibles (pluie, grêle, chaleur des canyons succédant au grand froid des montagnes), à quoi s'ajoutaient souvent la faim et la soif ...

Et puis il y avait l'angoisse du danger, les assauts imprévisibles et les embuscades de la part de groupes et/ou armées atahualpistes. Face à cela, Pizarro avait divisé ses troupes en trois groupes, l'un dirigé par lui-même et les deux autres par respectivement Hernando de Soto et Diego de Almagro. Ces trois groupes menèrent des actions séparées mais toujours coordonnées (support entre eux, attaques en tenaille, etc.), celui de Hernando de Soto opérant le plus souvent en avant-garde. 

Les Espagnols durent livrer trois importantes batailles:
  • La première à Jauja (15 octobre 1533), face aux troupes des généraux Yurac Huallpa et Ihua Paru. Les Espagnols et leurs auxiliaires indiens se livrèrent à un véritable massacre.   
    C'est à Jauja que Túpac Hualpa mourut, non pas lors de la bataille mais de façon inexpliquée (probablement par empoisonnement), 
  • La deuxième à Vilcas (27 et 28 octobre 1533) face aux troupes des généraux Apu Mayta (appelé aussi Apo Maita) et Quizquiz. Les Espagnols finirent par avoir le dessus mais eurent de nombreux blessés. 
  • La troisième à Vilcaconga (8 novembre 1533) face à nouveau à l'armée de Quizquiz et de ses alliés indiens Tarmas. Quatre cavaliers espagnols furent massacrés.
Comme on le voit, les batailles de Vilcas et Vilcaconga furent plutôt difficiles pour les Espagnols. A ce titre, Diego de Almagro et Hernando de Soto furent sidérés que l'ennemi ait pu connaitre en détail le mouvement de leurs troupes. Ils convainquirent Pizarro qu'il y avait donc un espion parmi eux, lequel était Chalcuchímac. Celui-ci fut donc condamné à mort et brûlé vif sur la place de Jaquijahuana (près de Cusco), le 12 novembre 1533, refusant à tout moment de se faire baptiser comme Chrétien (contrairement à Atahualpa).  

Le 14 novembre 1533, Manco Inca, autre fils de Huayna Cápac mais d'ascendance huáscariste se présenta à Pizarro pour proposer ses services. Agé de seulement 18 ans, il avait échappé au massacre des nobles de Cuzco que les atahualpistes avaient perpétré pendant la guerre civile (cf. paragraphe III plus haut). Pizarro accepta volontiers cette nouvelle alliance, au vu des avantages que cela représentait. 

Le ralliement de Manco Inca se traduisit aussitôt par davantage de troupes aux côtés de Pizarro, au point d'influencer fortement le projet de remplacement de Túpac Huallpa. Il fut décidé, en accord avec Diego de Almagro et Hernando de Soto, que Manco Inca serait le prochain Empereur ("Sapa Inca"), une fois la capitale Cusco conquise.

La prise de Cusco était en effet capitale. L'importance de la ville tenait au fait que, d'une part, elle regorgeait de richesses (or et argent) et que, d'autre part, elle était le cœur politique, religieux et géographique de l'Empire Inca, avec de nombreux temples, palais et forteresses importants. Donc si la ville tombait, l'empire tombait avec elle.

B. La prise de Cusco (15 novembre 1533) 

A ce moment-là, le redoutable et astucieux général Quizquiz défendait la ville de Cusco et il savait l'arrivée des Espagnols imminente. Il était surtout parfaitement conscient de la supériorité de la cavalerie en rase campagne et du danger mortel que représentait l'artillerie. Lorsque l'armée espagnole approcha de Cusco, Pizarro envoya son frère Juan Pizarro et Hernando de Soto en avant avec une quarantaine de cavaliers. Cette avant-garde livra une bataille rangée avec les troupes incas devant la ville, remportant une rapide victoire. Constatant cela, Quizquiz considéra que combattre rue par rue était indéfendable et qu'il fallait éviter de se retrouver pris dans un siège dont l'issue était prévisible. Sa tactique étant basée sur la mobilité de ses armées, il décida de mettre ses troupes hors de portée des charges de cavalerie et des canons espagnols. Dans la nuit, il quitta donc la ville de Cusco pour aller vers des zones montagneuses voisines, où les rivières profondes et les défilés escarpés annuleraient l'avantage des troupes à cheval et de l'artillerie. Tout cela dans l'attente de jours meilleurs ...

C'est ainsi que, le 15 novembre 1533, Pizarro entra dans Cusco, en compagnie de Manco Inca, de l'armée espagnole et des alliés indigènes. Ils ne rencontrèrent aucune résistance (les atahualpistes avaient tous fui) mais, bien au contraire, eurent droit aux acclamations des habitants de Cuzco pour avoir vaincu Atahualpa, l'usurpateur du trône. Ils furent fascinés par tout ce qu'ils voyaient, dépassant toutes leurs espérances: la splendeur d'une cité doublée d'une abondance d'or à peine imaginable.
  • Un saccage en règle Les Espagnols pénétrèrent violemment dans les monuments et les lieux sacrés des Incas. Saisis de frénésie, ils dépouillèrent les momies de leurs trésors, emportèrent les ornements en métal précieux, arrachèrent les revêtements d'or et d'argent plaqués contre les murs. L'exemple le plus typique fut la dévastation du "Temple du Soleil", un site emblématique pour les Incas (cf. photo ci-dessus).On raconte que la profusion était telle que les hommes finirent par délaisser l'argent pour ne prendre que l'or, arrivant même à une sorte d'écœurement. Le butin saisi fut supérieur de 20% à celui de Cajamarca et son partage eut lieu le 22 février 1534.
  • Le sacre de Manco Cápac II Dès le lendemain de la prise de Cusco, soit le 16 novembre 1533, Pizarro fit de Manco Inca le nouveau "Sapa Inca" (Empereur), mais en même temps un vassal de la Couronne d'Espagne. Les Espagnols l'appelèrent Manco Cápac II (7), car ils apprirent que le premier Inca s'appelait déjà Manco (Manco Cápac). Se croyant l'objet de flatteries de la part des Espagnols, Manco Cápac II accepta naïvement de reconnaître le Roi d'Espagne comme souverain suprême de tous ses domaines. Il ordonna également que son armée, soit quelque 5 000 soldats sous le commandement de son frère Paullu Inca, quitte la ville pour se joindre aux expéditions des Espagnols contre Quizquiz. 
C. La progression implacable des Espagnols Une fois la capitale de l'Empire Inca conquise, les Espagnols s'empressèrent d'étendre leur emprise sur l'ensemble du territoire. Pour cela, ils continuèrent à livrer plusieurs batailles, en différents endroits, contre les armées atahualpistes des généraux Quizquiz et Rumiñahui. Ces batailles furent menées essentiellement par les troupes de Diego de Almagro, Hernando de Soto, Manco Cápac II et Pedro de Alvarado (arrivé en renfort depuis le Guatemala). Elles se soldèrent toujours par des victoires, bien que parfois avec de lourdes pertes (hommes et chevaux).
En voici les principales: Deuxième bataille de Jauja en février 1534, bataille de Maracaylla en mai 1534, conquête de Quito en août 1534 et campagne dans le Nord en 1535. Rumiñahui fut capturé en juin 1535 et brûlé vif sur la "Plaza Mayor" de Quito. Quant à Quizquiz lui-même, il fut assassiné par l'un de ses officiers qui souhaitait que le bain de sang engendré par toutes ces guerres prenne fin (requête qu'avait vivement rejetée Quizquiz).

Chaque fois que les Espagnols s'emparaient de villes incas importantes, ils s'empressaient de les transformer en "fondations espagnoles". Il s’agissait d’un processus de colonisation au cours duquel ces villes incas étaient "reformatées" en villes espagnoles.

Cela impliquait la construction de nouvelles structures architecturales (églises, maisons, places, rues, etc.) suivant le modèle urbain espagnol. De nouvelles institutions politiques et religieuses étaient également créées, telles que des conseils, des audiences et des évêchés, afin de remplacer les structures de pouvoir indigènes. En outre, la culture espagnole était introduite, notamment la langue, la religion et les coutumes catholiques.

Ces "fondations espagnoles" visaient avant tout à consolider le contrôle espagnol sur les territoires conquis et à faciliter l'exploitation économique des ressources naturelles et de la main-d'œuvre indigène. Elles cherchaient également à diffuser la foi catholique et la culture espagnole parmi la population indigène, dans un processus connu sous le nom d'évangélisation.

Voici trois exemples de principales villes qui furent transformées en "fondations espagnoles", et cela durant la même année: Cusco (mars 1534), Jauja (avril 1534) et Quito (août 1534).

Pendant ce temps-là, Pizarro, que le Roi d'Espagne avait nommé Gouverneur de tous les territoires qu'il avait conquis, consacra une bonne partie de son temps à trouver un endroit adéquat où établir sa nouvelle capitale.   

D. La fondation de la capitale Lima, "La Cité des Rois" (18 janvier 1535)

Le premier choix de Pizarro fut la ville de Jauja. De fait, lorsque les Espagnols arrivèrent dans la vallée de Jauja, ils la trouvèrent si belle qu'ils ne purent réprimer leur admiration. Mais cette ville se trouvait au milieu des Andes et présentait donc le double inconvénient d'être située en altitude et surtout loin de la mer.
Des explorateurs espagnols qu'ils avait envoyés prospecter, lui indiquèrent avoir trouvé un endroit particulièrement intéressant. Celui-ci était situé dans la vallée du fleuve Rímac, près de l'Océan Pacifique. Il occupait un
emplacement stratégique entre les montagnes et la mer, avec d'abondantes réserves d'eau et de bois, de vastes champs de cultures et un bon climat. Il s'agissait de la ville de Limac, habitée par environ 20 000 habitants de l'ethnie Yunga.

Pizarro fut immédiatement convaincu et c'est là, le 18 janvier 1535, qu'il fonda la nouvelle capitale du Pérou (cf. photo ci-dessus). Cette ville fut nommée "Ciudad de los Reyes" (la "Ville des Rois") en l'honneur de l'Épiphanie, une fête chrétienne qui venait d'être célébrée quelques jours auparavant (6 janvier). Plus tard, elle prendra le nom de Lima (dérivé de Limac). C'est ce nom qui sera utilisé dans la suite de cet article.

Pizarro participa personnellement au "design" de sa nouvelle capitale, notamment de la Place d'Armes, du Palais du Vice-Roi (actuel Palais du Gouvernement du Pérou) et de la Cathédrale ... dont il posera la première pierre de ses propres mains.
E. La rébellion de Manco Cápac II (1536-1545)

Bien qu'ayant loyalement et bravement combattu avec son armée aux côtés des Espagnols, Manco Cápac II finit par se rendre compte de l'énorme erreur qu'ils avait commise en leur faisant confiance. En effet:
  1. Il ne pouvait régner, bien qu'étant dans le Palais de ses ancêtres, .
  2. Il ne pouvait recevoir ses sujets sans être surveillé.
  3. Il ne pouvait pas se déplacer librement à Cuzco.
  4. Il constatait de multiples abus de la part des Espagnols contre les femmes de la noblesse, le peuple et les "Vierges du Soleil" (8).
  5. Il souffrait de quolibets et de très mauvaises blagues de la part de ces mêmes Espagnols.
  6. Il réalisait à présent que leur intention était bien de prendre le contrôle total de l'Empire.
Début 1536, après s'être enfui, il parvint à réunir une force de 100 000 à 200 000 hommes et décida de mener une guerre pour restaurer l'Empire Inca. II constitua deux armées principales, l'une dirigée par le général Quizu Yupanqui et l'autre par lui-même.

Plusieurs confrontations se déroulèrent entre ces deux armées incas (les "mancocapistes") et celles des Espagnols et de leurs auxiliaires indigènes. En voici les principales:
  • Le siège de Cusco (mai 1536 - mars 1537) Le 6 mai 1536, les forces mancocapistes attaquèrent la ville par surprise, où la plus grande force espagnole était commandée par Hernando Pizarro. Après plusieurs jours de combats, elles conquirent la forteresse de Sacsayhuamán dominant la ville (cf. photo ci-dessous), ce qui mit les défenseurs espagnols de Cusco dans de sérieuses difficultés. De fait, elles leur infligèrent de lourdes pertes. C'est ainsi que Juan Pizarro, l'un des quatre frères, fut mortellement blessé.
    Le siège de la ville dura plus de huit mois, et les mancocapistes, voulant étendre leur révolte sur tout le territoire inca, attaquèrent Cuzco violemment "chaque nuit de pleine lune". Les Espagnols luttèrent et se défendirent comme des hommes n’ayant d'autre espoir que le secours de Dieu. Leurs propres forces diminuaient chaque jour, à cause des pertes subies. Heureusement pour eux, ils reçurent du renfort de la part d'un contingent de l'armée de Diego de Almagro, lequel était parti pour une longue expédition au Chili (territoire du Collasuyo) dont il prendra possession en 1536. Ils lancèrent alors une contre-attaque féroce, avec toutes leurs forces (cavalerie, etc.). La bataille dura plusieurs jours, avec de lourdes pertes des deux côtés. Une fois de plus, m
    algré leur supériorité numérique, les Incas ne purent rien faire contre la supériorité technologique des Espagnols. Ceux-ci reprirent la forteresse, ce qui changea la donne: les forces de Manco Cápac II durent mettre fin au siège de la ville en avril 1537 et se réfugièrent dans la forteresse de Ollantaytambo (cf. plus bas).
  • Le siège de Lima (10 au 26 août 1536)
    Pour tenter d'empêcher Pizarro d'envoyer des renforts afin de soulager le siège de Cusco, les forces de Manco Cápac II (40 000 hommes environ), sous la direction de son lieutenant Quizu Yupanqui (9), assiégèrent Lima (la nouvelle Cité des Rois), entre le 10 et le 26 août 1536. La ville, vieille de seulement 18 mois, était défendue par une armée hispano-indigène, placée sous le commandement de Pizarro en personne.
    Quizu 
    Yupanki avança sur Lima, mais ne parvint pas à surprendre la défense bien organisée des Espagnols, qui bénéficiaient du soutien de milliers d'alliés indigènes, parmi lesquels les Curacas (locaux de la vallée de Lima), les Yauyos et les Huarochiri..


    La principale attaque contre Lima eut lieu le 24 août 1536, où Quizu Yupanki fut pris dans une embuscade et tué par la cavalerie espagnole (une lance lui traversa la poitrine). Les autres chefs incas qui l'accompagnaient subirent le même sort. Les Incas poursuivirent le combat mais furent confrontés à des armes supérieures et à des désertions de certains de leurs alliés, notamment des Huancas, qui rejoignirent le camp des Espagnols.

    Constatant leur échec, les capitaines incas décidèrent, le 26 août 1536, de lever le siège et de se retirer
     par les vallées de Chillón et Lurín (9). Cette défaite affaiblit la rébellion de Manco Cápac II et permit aux Espagnols de renforcer leur contrôle sur la région. 
  • La bataille d'Ollantaytambo (janvier 1537) Après avoir abandonné le siège de Cusco, Manco Cápac II avait replié son armée (30 000 hommes environ) dans la forteresse d'Ollantaytambo, située à 43 km à vol d'oiseau de Cusco, dans la "Vallée Sacrée" des Incas.
    Cette forteresse avait la particularité d'être dotée d'un ensemble de hautes terrasses agricoles (cf. figure ci-contre), qui fermaient la vallée entre les montagnes et un profond canyon formé par le fleuve Urubamba. Ces terrasses étaient un véritable obstacle pour la redoutable cavalerie espagnole et les Incas en avaient fait un véritable camp retranché. Il faut dire que, après tant d'affrontements, ils avaient beaucoup appris des techniques espagnoles. En janvier 1537, pour mettre fin au conflit et surtout en terminer avec Manco Cápac II, Hernando Pizarro attaqua la forteresse d'Ollantaytambo, à la tête d'une armée composée de 100 Espagnols (30 fantassins et 70 cavaliers) et de quelque 30 000 alliés indigènes.
    Les forces mancocapistes défendirent la forteresse contre plusieurs attaques espagnoles. Elles utilisèrent des tactiques de guérilla pour tendre des embuscades aux Espagnols et les attirer dans des pièges. Il y eut de lourdes pertes de chaque côté et notamment chez les Espagnols, ce qui était nouveau. Incapables d'avancer; ceux-ci se retirèrent
    de nuit vers la ville de Cuzco.  

    Mais cette victoire de Manco Cápac II fut de courte durée. Ayant reçu de nouveaux renforts à Cusco, les Espagnols revinrent à l'attaque. En dépit de nouvelles lourdes pertes (près de 500 soldats), ils finirent par à prendre la forteresse après plusieurs jours de féroces combats. Manco Cápac II fut contraint d'abandonner Ollantaytambo et de se réfugier dans les forêts denses de la région de Vilcabamba ... où allait survivre un État Inca indépendant jusqu'en 1572 (cf. ci-dessous).

F. L'État Inca de Vilcabamba et la fin de l'Empire Inca (1537-1572) 
L'État Inca ou Royaume Inca de Vilcabamba fut le dernier refuge de l'Empire Inca, établi dans la jungle montagneuse du Pérou. Il fut fondé en 1537, avec Vilcabamba comme capitale, par Manco Cápac II qui s'y était installé avec sa suite et sa famille, dont notamment ses trois fils: Titu Kusi Yupanqui (né en 1526), Sayri Tupac (né en 1535) et Túpac Amaru (né en 1545). Une nouvelle cour y fut établie, avec tous ses rites.
Après avoir dissout son armée, éreintée par tant d'années à combattre, Manco Cápac II noua des alliances avec plusieurs tribus voisines. Ceci lui permit de constituer une armée de guérilla qui, pendant des années, allait harceler les Espagnols avec des actions rapides et efficaces, mais sans jamais chercher la confrontation avec les troupes militaires.

Cette "Résistance Inca" étant particulièrement tenace, Pizarro estima que le moment était venu d'en terminer avec la dynastie des "Sapa Incas", en clair d'exécuter Manco Cápac II et ses trois fils. Leur disparition signifierait une fois pour toutes la fin de l'Empire Inca. Un événement capital allait enchaîner la suite des événements (cf. ci-dessous).

  • Conflit entre Diego de Almagro et Pizarro et assassinat des deux (respectivement en 1537 et 1541) Comme on l'a vu plus haut, Diego de Almagro (1475-1537) fut le compagnon d'armes de Pizarro depuis 1524. Il conquit l'actuel Equateur en 1524, le Chili en 1536 mais surtout sauva Cusco lors du siège de 1536. A son retour du Chili en 1537, il occupa la ville de Cusco en en revendiquant la propriété. Il alla jusqu'à emprisonner les frères Gonzalo et Hernando Pizarro. Il s'ensuivit un début de guerre civile entre les partisans de Pizarro (les "pizarristes") et ceux de Diego de Almagro (les "almagristes"). Le Roi Charles Quint ayant tranché en faveur de Diego de Almagro, Pizarro décida de faire assassiner celui-ci. Almagro fut effectivement exécuté le 8 juillet 1537 par strangulation et son cadavre fut décapité sur la "Plaza de Armas" de Cusco.
    Les almagristes, rassemblés autour de son fils Diego de Almagro el Mozo (1522-1542), décidèrent aussitôt de le venger. C'est ainsi que, le matin du dimanche 26 juin 1541, Pizarro (1478-1541) fut sauvagement assassiné. Les pizarristes entamèrent alors une véritable chasse à l'homme pour retrouver les assassins.

    Ces derniers, ainsi que plusieurs autres almagristes, allèrent trouver refuge auprès de Manco Cápac II. Celui-ci en effet, à cause de son ancienne inimitié envers les Pizarro, s'était aussitôt rangé du côté de Diego de Almagro (père) et c'est avec grand plaisir qu'il accueillit les fugitifs en question.

    Quant à Diego de Almagro el Mozo, qui n'avait pu rejoindre lui-aussi Manco Cápac II (une escale à Cuzco l'ayant trahi), il fut arrêté par la suite et décapité, le 27 novembre 1542, au même endroit où son père l'avait été. Son cadavre fut ensuite exposé à la honte publique. 
  • Assassinat de Manco Cápac II (1545) 
    Bien que retiré au cœur de la jungle, Manco Cápac II allait être victime, comme son demi-frère Atahualpa, de la traîtrise espagnole. 
    Alonso de Toro, Gouverneur de Cuzco et chef des pizarristes de la région, prit l'initiative d'entamer des pourparlers avec les réfugiés almagristes de Vilcabamba. Il leur offrit le pardon s'ils tuaient Manco Cápac II.
    Ils acceptèrent et, dans les premiers mois de 1545, assassinèrent Manco Cápac II chez lui, devant son propre fils (celui-ci, devenu plus tard chroniqueur, racontera la scène).

    Malheureusement pour eux, au moment où ils sortirent de l'habitation de Manco Cápac II, en célébrant la mort de leur protecteur et ami, ils furent capturés par le capitaine Rimachi Yupanqui et ses hommes.

    Après un interrogatoire en règle, avec les moyens que l'on devine, sept d'entre eux furent identifiés comme étant les véritables meurtriers. Les sept furent brûlés vifs et décapités. Leurs têtes furent ensuite exposées sur les places de Vilcabamba.
  • Règne de Sayri Tupac (1545-1561) Désigné par Manco Cápac II comme héritier du trône, Sayri Tupac régna donc dès l'âge de cinq ans, et cela pendant dix ans, sous la tutelle de régents. Cette période fut marquée par une paix relative avec les Espagnols. Le Vice-Roi Pedro de la Gasca proposa à Sayri Tupac de lui donner des terres et des maisons à Cuzco, s'il quittait Vilcabamba. Bien que Sayri Tupac ait initialement accepté, la mort soudaine de son oncle, Paullu Inca, pendant les préparatifs, fut considérée comme un mauvais présage ou un signe de trahison espagnole. Sayri Tupac décida donc de rester à Vilcabamba, où il mourut subitement en 1561 (probablement d'empoisonnement).
  • Règne de Titu Kusi Yupanqui (1561-1571) A la mort de son frère Sayri Tupac, Titu Kusi Yupanqui prit la tête de Vilcabamba et de la Résistance Inca. Très vite, il reconnut les comités politiques et religieux de Cuzco afin d'arriver à un accord avec le Vice-Roi Pedro de la Gasca. En 1568, il accepta même d'être baptisé Chrétien. Malheureusement, Il mourut lui-aussi d'une étrange maladie (ou peut-être empoisonné) en 1571.
  • Règne de Túpac Amaru (1571-1572) et chute finale de l'Empire Inca (1572)
    Túpac Amaru devint donc le dirigeant suprême, après la mort subite de son frère Titu Kusi Yupanqui. Malgré son jeune âge et son manque d'expérience, il fut un ennemi redoutable pour les conquistadors, avec un esprit rebelle contrastant avec la faiblesse de son frère.
    Les Espagnols décidèrent d'en finir avec lui et envoyèrent une troupe de près de 300 soldats pour le capturer. Lorsque ceux-ci arrivèrent sur place, Túpac Amaru s'était déjà enfui dans la jungle avec sa famille et ses partisans, où il continua à mener une guérilla féroce contre les Espagnols. Finalement, ceux-ci réussirent à le capturer et le ramenèrent à Cusco. Il fut condamné à mort et l'exécution fixée au 24 septembre 1572.

    Ce jour-là, sur la place centrale de Cusco, un échafaudage drapé de noir avait été érigé. Des milliers d'Indiens présents, réalisant que leur "Sapa Inca" allait mourir, assourdirent le ciel de leurs cris et gémissements. C'est alors que Túpac Amaru, la corde au coup, leva la main pour faire taire la foule et ses derniers mots furent: "Ccollanan Pacha Kamaq ricuy auccacunac yawarniy hichascancuta" ! (" Pacha Kamaq, vois comment mes ennemis ont versé mon sang" !) (10).

Le dernier Empereur Inca venait de disparaitre et, avec lui,
tout espoir de restaurer leur grand Empire.
En l’espace de quatre décennies (1532-1572),
les Espagnols avaient accompli ce qui semblait impossible:
démanteler un Empire séculaire s’étendant sur tout un continent et appartenant
à l’une des sociétés les plus sophistiquées de toutes les Amériques. 

 
VI. Les vrais raisons de la chute de l'Empire Inca

Que quelques centaines d'hommes soient parvenus à asservir un empire de plusieurs millions d'habitants, semble tout simplement incroyable. Dans ce qui précède, un certain nombre d'explications ont été avancées
 sur le sujet (épidémie, guerre civile interne, etc.). En fait, voici la liste (pratiquement exhaustive) des raisons permettant de comprendre la rapidité et l’ampleur de l'effondrement du puissant Empire Inca:
  1. L'utilisation par les Espagnols d'armes en acier létales (arquebuses, lances, épées, etc.), ce qui rendit les armures des soldats incas totalement inefficaces contre eux.
  2. Le port d'armures en acier par les Espagnols, qui rendit les gourdins et les frondes des Incas inefficaces contre eux.
  3. L'utilisation de la cavalerie par les Espagnols, cette tactique que les armées amérindiennes ne réussirent jamais à contrer efficacement (les Incas n'avaient jamais vu de chevaux auparavant).
  4. Des épidémies de maladies extrêmement contagieuses (variole, rougeole), originaires d'Europe, qui décimèrent des peuples entiers à travers toute l'Amérique (avec des taux de mortalité pouvant atteindre 95 %).
  5. Une guerre civile au sein de l'empire, suite à la mort brutale de l'empereur Huayna Cápac (en 1527, probablement de la variole ou de la rougeole), qui n'avait pas pu désigner lequel de ses fils prendrait sa succession.
  6. L'ignorance des Incas, qui croyaient que les Espagnols n'oseraient pas attaquer sans avoir l'avantage du nombre (bien que l'Empire Aztèque ait été vaincu, dix ans auparavant, par un nombre similaire de conquistadors). Cette méconnaissance est attribuable au manque de circulation d'informations à l'intérieur du Nouveau-Monde (pas de réseaux sociaux à l'époque).
  7. La brillante centralisation et les capacités logistiques de l'État Inca étaient ironiquement aussi sa plus grande faiblesse, à partir du moment où elles se trouvaient sans un leader central résoluCela explique la "débandade" qui fit suite à la capture (et plus tard à l'exécution) par les Espagnols de l’Empereur Inca semi-divin Atahualpa. Cet acte occulta le chef spirituel, culturel et gouvernemental qui servait de force unificatrice à tout l'Empire. Avec la mort de l’Empereur et la propagation des troubles civils, le cadre de la résistance organisée à l’invasion espagnole se désintégra tout simplement. Les seigneurs locaux, les généraux et les gouverneurs commencèrent à poursuivre leurs propres programmes.
  8. La pratique de la guerre par les Incas était hautement codifiée par des rituels. Des stratégies telles que la ruse, l'embuscade et la dissimulation leur étaient étrangères, de même que l'adaptation tactique en pleine bataille ou la saisie des moments de vulnérabilité de l'adversaire. De plus, les soldats incas étaient fortement tributaires de leurs chefs. Si ces derniers venaient à tomber au combat, toute une armée pouvait basculer dans une déroute précipitée.
  9. Les armées incas étaient en grande partie composées de fermiers, lesquels ne pouvaient pas abandonner trop longtemps leur récolte sans affamer leurs communautés.
VII. Les conséquences de la chute de l'Empire Inca

La chute de l'Empire Inca a eu des conséquences profondes pour la population et la culture inca, ainsi que pour l'histoire et la société de toute l'Amérique du Sud.
A. Les effets sur la population et la culture incas

La conquête espagnole a eu un impact humain et culturel dévastateur sur les populations andines, entraînant des pertes humaines massives, la destruction de leur patrimoine culturel et une assimilation forcée à la société espagnole.
  • Pertes humaines et asservissement: Les Incas ont été décimés par les conflits militaires, les maladies apportées par les Européens et la déstabilisation sociale. On estime que 80% à 90% de la population inca a péri en quelques décennies. Les survivants ont été asservis et forcés de travailler dans des conditions terribles: mines, plantations, etc.
  • Destruction du patrimoine et perte de connaissances:
    De nombreux sites incas, temples, monuments et sites sacrés ont été pillés, rasés ou profanés. Des savoirs ancestraux, des traditions, des techniques artisanales et des expressions artistiques ont été perdus à jamais. La destruction de la culture inca a appauvri la diversité culturelle de l'Amérique du Sud.
  • Assimilation forcée et marginalisation: Les Incas ont été contraints d'abandonner leurs dialectes, leurs coutumes et leurs croyances pour adopter le mode de vie espagnol. Cette assimilation forcée a conduit à la marginalisation et à l'appauvrissement des populations indigènes des Andes, une situation qui perdure encore aujourd'hui.
  • Résistance et revendications:
    Malgré la tragédie de la conquête, la mémoire de l'Empire Inca et la volonté de préserver leur identité perdurent au sein des peuples andins. Ceux-ci continuent de lutter pour leurs droits, la reconnaissance de leur culture et la protection de leurs terres ancestrales.
B. L'impact sur l'histoire et la société de l'Amérique du Sud

La colonisation espagnole a bouleversé les sociétés d'Amérique du Sud et a laissé un héritage complexe qui continue d'influencer la région aujourd'hui.

  • Colonisation et domination espagnole:
    L'effondrement de l'Empire Inca a permis aux conquistadors espagnols de coloniser toute l'Amérique du Sud (à l'exception du Brésil) et d'établir leur domination sur cet immense territoire pendant plus de trois siècles. Cette domination s'est traduite par l'imposition de la langue espagnole, de la religion catholique et de la culture européenne aux populations indigènes. Les structures sociales et culturelles préexistantes ont été bouleversées, souvent de manière brutale et violente.
  • Exploitation et injustices:
    Les systèmes économiques et politiques, mis en place par les colons, étaient basés sur l'exploitation des ressources naturelles et du travail forcé des populations autochtones. Les peuples indigènes ont été victimes de discriminations, d'inégalités et de violences. Ils étaient souvent réduits en esclavage et contraints de travailler dans des conditions terribles (mines, plantations, etc.).
  • Impact dévastateur sur les populations indigènes:
    Les populations indigènes d'Amérique du Sud ont subi un déclin démographique dramatique à la suite de la colonisation. Les maladies apportées par les Européens, les massacres et les conditions de vie difficiles ont décimé des populations entières. 
  • Luttes pour l'indépendance et héritage colonial:
    Au XIXème siècle, des mouvements d'indépendance ont émergé dans toute l'Amérique du Sud, aboutissant à la fin du régime colonial dans la plupart des pays. Cependant, l'héritage de la colonisation espagnole continue de peser sur les sociétés de la région. Les inégalités et les tensions raciales persistent, en particulier dans les zones rurales et parmi les populations indigènes.
  • Conséquences profondes et durables:
    La chute de l'Empire Inca et la colonisation espagnole ont eu des conséquences profondes et durables sur l'histoire et la société de l'Amérique du Sud. Elles ont marqué un changement radical dans les structures politiques, sociales et économiques de la région, et ont laissé un héritage complexe qui continue d'influencer les sociétés contemporaines.

C. L'héritage de l'Empire Inca dans la culture et l'histoire de la région

Bien que disparu en tant qu'entité politique, l'Empire Inca a laissé un héritage culturel et historique profondément enraciné dans l'Amérique du Sud. Cet héritage se manifeste dans de nombreux aspects de la vie quotidienne des peuples de la région et constitue une part importante de leur identité.

  • Présence tangible de l'Empire Inca:
    Les ruines majestueuses des cités incas, comme Machu Picchu (l'une des Sept Nouvelles Merveilles du Monde), attirent des touristes du monde entier et témoignent de la grandeur passée de cet Empire. La langue quechua, parlée par des millions de personnes dans la région, perpétue l'héritage linguistique des Incas. La cuisine inca, avec ses ingrédients et ses techniques culinaires uniques, a durablement influencé la gastronomie de l'Amérique du Sud (contribuant à faire de la Cuisine Péruvienne, la troisième meilleure du monde).
  • Présence immatérielle dans les cultures et traditions:
    De nombreux peuples indigènes d'Amérique du Sud conservent des traditions et des cultures qui ont été influencées par l'Empire Inca. L'architecture, l'agriculture en terrasses, la religion et les artisanats incas continuent d'influencer la vie quotidienne des populations autochtones. Des mouvements contemporains s'efforcent de préserver et de promouvoir ces cultures et traditions, contribuant ainsi à la transmission de cet héritage précieux aux générations futures.
  • Célébration et commémoration de l'histoire inca:
    L'histoire de l'Empire Inca est célébrée et commémorée à travers des festivals, des événements culturels et des sites archéologiques (notamment le somptueux Inti Raymi, Fête du Dieu Soleil). Ces manifestations permettent de maintenir la mémoire collective de l'empire et de partager cet héritage avec le monde entier.

Conclusion

La conquête de l'Empire Inca par les Espagnols restera comme l'une des plus grandes tragédies de l'Histoire. En effet, avec elle, c'est une civilisation qui se substitua à une autre, dans une démarche basée sur la barbarie et la terreur. Décimée (à environ 50%) par la guerre et les maladies, la population inca 
se vit imposer un nouveau mode de vie (l'esclavage souvent), une nouvelle culture, une nouvelle langue et une nouvelle religion.

Le 20 novembre 1542, Charles Quint créa la Vice-Royauté de l'Empire Colonial Espagnol. Il l'installa dans la "Ville des Rois" (Lima), afin d'administrer l'ensemble des territoires conquis en Amérique du Sud. Ce fut le début d’une nouvelle ère de colonisation et de domination européenne (11) 

Malgré ce destin tragique, l'héritage de l'Empire Inca perdure et continue de marquer l'Amérique du Sud. Les ruines incas fascinent, la culture et les traditions incas survivent, perpétuant la mémoire de cet Empire extraordinaire.


Sources 

La chute de l'Empire Inca (Historia Numéro Spécial - juillet 2020) 

N/A

16 novembre 1532 : le jour où s'effondra l'Empire Inca 

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La conquête des Incas

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Conquête espagnole de l'Empire Inca

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Inti Raymi: le Folklore Péruvien dans toute sa splendeur 

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Pizarro & the Fall of the Inca Empire (World History Encyclopedia)

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Sucedió en el Perú (TV Perú) - La Conquista del Tahuantinsuyu

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(1) : Ces maladies furent introduites dès 1492, avec l'arrivée de Christophe Colomb, et se propagèrent ensuite très vite dans l'Isthme de Panama, le Mexique et ensuite les Andes. De 1514 à 1530, près de deux millions d'Indigènes auraient succombé aux "fièvres" dans le seul Isthme de Panama.
(2) : Le souverain mourut terrassé par une maladie mystérieuse (certainement la variole, ou peut-être la rougeole, contre lesquelles les Indiens n'étaient pas immunisés) apportée par les conquistadors espagnols. 
(3) : Tout cela sera fondu
 pour en faire des lingots d'or et d'argent. Le montant de ce butin sera réparti sous forme de parts, chacune de 20,20 kilos d'or et 42 kilos d'argent. La distribution de ces parts se fera de façon inégale: les quatre frères Pizarro en recevront près de 25, tandis que les cavaliers et fantassins recevront chacun entre 0,5 à 2 parts (en fonction de leur grade). De quoi aviver les tensions entre les acteurs de la conquête ...
(4) Dans la religion inca, l'âme d'un mort ne pouvait rejoindre l'au-delà si son corps était brûlé. (5) : Le massacre de Cajamarca et l'exécution d'Atahualpa restent un symbole de la violence et de la brutalité de la conquête espagnole des Amériques. Ils mirent en évidence la nécessité de protéger les droits des peuples indigènes et de limiter la puissance des conquistadors. (6) : Différentes ethnies ou nations, dans espérant de s'extirper du joug inca, apportèrent leur soutien et voire-même se rallièrent à Pizarro.
(7) : Manco Cápac II devenait ainsi "Sapa Inca" après successivement (périodes de règne indiquées entre parenthèses):
Manco Cápac (1197-1230) - Sinchi Roca (1230-1260) - Lloque Yupanqui (1260-1290) Mayta Cápac (1290-1320) - Tarco Huamán (1320) - Cápac Yupanqui (1320-1350) Inca Roca (1350-1380) - Yáhuar Huácac (1380-1440)
Huiracocha (1400-1438) - Pachacútec Yupanqui (1438-1471)
Túpac Yupanqui (1471-1493) - Huayna Cápac (1493-1527) - Huáscar (1527-1532) Atahualpa (1532-1533) - Túpac Huallpa (août à septembre 1533)
(8) : Les "Vierges du Soleil" étaient des femmes choisies dans l'Empire Inca pour servir le "Dieu Soleil", lequel était considéré comme l'ancêtre divin des Incas. Elles étaient également connues sous le nom de "Choses du Soleil" ou "Épouses du Soleil". Ces femmes étaient sélectionnées pour leur beauté, leur grâce et leur lignée noble dès leur plus jeune âge. Elles étaient ensuite emmenées dans un couvent appelé "Acllahuasi", où elles recevaient une éducation rigoureuse dans la plus extrême chasteté. Elles y apprenaient les arts domestiques, la préparation des aliments, la fabrication de la bière de maïs ("Chicha"), le tissage des vêtements fins et l'art de la cérémonie. Elles préparaient les aliments et les boissons pour les cérémonies religieuses, entretenaient les temples et les autels et participaient aux rituels et aux cérémonies. Certaines d'entre elles étaient également formées pour devenir prêtresses. (9) : Selon certains historiens, le retrait des troupes incas fut influencé par la perte de la plupart de leurs chefs et la désertion de certains groupes ethniques alliés. (10) : Pacha Kamaq aussi appelé Pachacamac, Pacha-Camak, Pacharurac ou encore Pachöu-Kamù était le Dieu créateur des peuples établis le long des côtes du Pérou. Il était vénéré comme étant le fils du Soleil et de la Lune.
(11) :
Suivront plusieurs vagues d'immigration en provenance notamment d'Europe, d'Asie (Chine, Japon) et d'Afrique (esclaves amenés de force là-bas). Ce qui allait se traduire par une fusion de cultures et de sociétés, donnant naissance à la civilisation métisse qui caractérise aujourd’hui une grande partie de l’Amérique du Sud.