A propos de l'OTAN ...

Depuis quelques semaines et le début de la crise ukrainienne, il n'y a pas un seul article ni une seule émission Radio/TV sur le sujet qui ne mentionnent le nom de l'OTAN. Effectivement, l'une des raisons qui ont conduit au déclenchement des hostilités est tout simplement la suivante: l'Ukraine souhaite adhérer à l'OTAN, ce que la Russie a toujours défini comme étant une "ligne rouge". 

Ce petit article a pour propos de rappeler très rapidement ce qu'est l'OTAN (ses objectifs, son organisation, son mode d'action) et de dire également un mot sur les différentes missions accomplies depuis sa création ... ainsi que sur son côté "Bouclier".

Tout d'abord, qu'est-ce que l'OTAN ?

Il s'agit de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN), véritable alliance politique et militaire entre les États-Unis, le Canada et l’Europe de l'Ouest. L'objectif principal de ce Traité était de garantir la sécurité et la liberté de ses membres en visant, en pleine Guerre Froide, à dissuader l’Union Soviétique de toute tentative d’expansion territoriale notamment depuis la création du Pacte de Varsovie. 

Ce Traité, connu également sous le nom de Traité de Washington ou encore Traité de l'Atlantique Nord, fut signé à Washington le 4 avril 1949 par les 12 membres fondateurs de l'Organisation (France, États-Unis, Royaume-Uni, Belgique, Canada, Danemark, Islande, Italie, Luxembourg, Norvège, Pays-Bas, Portugal). Il trouve son fondement même dans l'Article 51 de la Charte des Nations Unies, où est réaffirmé le droit naturel des États indépendants à la légitime défense, individuelle ou collective.

Après l’effondrement de l’URSS en 1991, l'OTAN a commencé à s’élargir à d’autres pays d’Europe de l’Est. Actuellement, elle compte 30 membres (28 pays européens et 2 pays nord-américains) autour d'un système de défense collective, de missions et d'objectifs communs (civils et militaires) et de normalisation des armées. Ces pays sont les suivants (l'année de leur adhésion est précisée entre parenthèses):

Albanie (2009)  Allemagne (1955)  Belgique (1949)  Bulgarie (2004)  Canada (1949)

Croatie (2009)  Danemark (1949)  Espagne (1982)  Estonie (2004)  États-Unis (1949)

France (1949)  Grèce (1952)  Hongrie (1999)  Islande (1949)  Italie (1949)

Lettonie (2004)  Lituanie (2004)  Luxembourg (1949)  Macédoine du Nord (2020)

Monténégro (2017)  Norvège (1949)  Pays-Bas (1949)  Pologne (1999)

Portugal (1949)  République Tchèque (1999)  Roumanie (2004)

Royaume-Uni (1949)  Slovaquie (2004)  Slovénie (2004)  Turquie (1952)

Lors de sa création en 1949, le Siège de l'OTAN se trouvait à Londres. En 1950, il fut décidé de le transférer à Paris en raison surtout de la position centrale et des excellents moyens de communications de la capitale française (1). En 1966, après que la France ait décidé de quitter le Commandement Intégré de l'OTAN (elle y reviendra en 2009), le Siège fut déplacé à Bruxelles.

Principe de fonctionnement et prises de décisions au sein de l'OTAN

L'OTAN se consacre à garantir la liberté et la sécurité de ses membres. Elle le fait par des moyens politiques et militaires: 

• Moyens Politiques : l'OTAN s'emploie à promouvoir les valeurs démocratiques et permet à ses membres de se consulter et de coopérer sur les questions de défense et de sécurité afin de résoudre les problèmes, d'instaurer la confiance et, à long terme, de prévenir les conflits. Cela relève d'une structure politique de l'OTAN, laquelle est dirigée (généralement) par un Européen.
• Moyens Militaires : l'OTAN est attachée à la résolution pacifique des différends. Si les efforts diplomatiques échouent, elle dispose de la puissance militaire nécessaire pour entreprendre des opérations de gestion de crise. Celles-ci sont menées, en application de la clause de défense collective du traité fondateur (Article 5 du Traité de l'Atlantique Nord) ou sous mandat de l'ONU (Organisation des Nations Unies), par l'OTAN seule ou en coopération avec des pays non membres ou d'autres organisations internationales. Cela relève d'une structure militaire de l'OTAN, laquelle est (toujours) dirigée par un Américain.

En 2002, lors du sommet de l'Organisation à Prague, en 2002, il a été décidé de créer une Force de Réaction Rapide de l'OTAN (en Anglais : NRF/NATO Response Force). En 2014, lors du sommet du Pays de Galles, il a été décidé de renforcer cette NRF (opérationnelle depuis 2004) en la dotant d'une Force Opérationnelle Interarmées à Très Haut Niveau de Préparation (en Anglais : VJTF/Very High Readiness Joint Task Force).  

Aujourd'hui la NRF est une force multinationale d'environ 25 000 hommes, regroupant des éléments de forces TAMOS (Terrestres, Aériennes, Maritimes et Opérations Spéciales) et disposant d'un matériel militaire de très haute technologie. Elle est interopérable et déployable n'importe où dans le monde en cinq jours, sur une période pouvant aller jusqu'à trente jours.

Sa composante VJTF représente une brigade multinationale d'environ 5 000 hommes. Elle est disponible à tout instant et peut être déployée en opération dans un délai de 2 à 3 jours, mais seulement pour défendre l’un des pays membres de l’Alliance. Le commandement de cette brigade est assuré par rotation, tous les douze mois, entre sept pays: l'Allemagne, l'Espagne, la France, l'Italie, la Pologne, le Royaume-Uni et la Turquie. Depuis le 01/01/2022, c'est la France qui tient ce rôle. Elle succède en cela à la Turquie et, le 01/01/2023, passera le relais à l’Allemagne pour l'année 2023.

Chaque jour, les pays membres de l'OTAN se consultent et prennent des décisions sur des questions de sécurité, à tous les niveaux et dans une grande variété de domaines. De plus, 

ils tiennent compte en permanence des avis de centaines de représentants et d'experts civils et militaires qui sont conviés pratiquement tous les jours au siège de l'OTAN. De tels échanges sont la meilleure garantie de pouvoir identifier chaque fois, pour un problème déterminé, les mesures pertinentes à prendre avec l'accord de tous.

Une "Décision de l'OTAN" sera toujours l'expression de la volonté collective de l'ensemble des 30 membres, dans la mesure où toutes les décisions sont prises par consensus. .

Concernant les fameux Articles 4 et 5

Le Traité de l'Atlantique Nord est relativement court; de fait, il ne comporte que 14 Articles. 

Malgré un environnement de sécurité en constante évolution, le texte d'origine n'a jamais dû être modifié; chacun des pays membres peut le mettre en application en fonction de ses capacités et de sa situation.

Parmi ces Articles, deux d'entre eux ont une importance toute particulière:

• L'Article 4

Cet Article 4 du Traité de l'Atlantique Nord prévoit que les membres de l'Alliance se consulteront "chaque fois que, de l'avis de l'une d'elles, l'intégrité territoriale, l'indépendance politique ou la sécurité de l'une des parties sera menacée". Chaque pays membre peut donc formellement l'invoquer; la question soulevée est alors débattue et peut éventuellement déboucher sur une forme de décision ou d'action conjointe au "nom de l'Alliance".

Cet Article 4 a été activé sept fois depuis la création de l'Alliance en 1949, notamment  par la Lituanie en 2021 (quand la Biélorussie amassait des clandestins aux frontières de l'Union Européenne) et par la Turquie en 2003 (inquiète de menaces contre elle en cas de conflit en Irak). 

Si cet Article 4 prévoit des consultations entre alliés, il n'entraine pas automatiquement de réaction militaire.

• L'Article 5 

Cet Article 5 est le cœur même du Traité de l'Atlantique Nord. En effet il stipule ce qui suit:

"Les parties conviennent qu'une attaque armée contre l'une ou plusieurs d'entre elles survenant en Europe ou en Amérique du Nord sera considérée comme une attaque dirigée contre toutes les parties, et en conséquence elles conviennent que, si une telle attaque se produit, chacune d'elles, dans l'exercice du droit de légitime défense, individuelle ou collective, reconnu par l'article 51 de la Charte des Nations Unies, assistera la partie ou les parties ainsi attaquées en prenant aussitôt, individuellement et d'accord avec les autres parties, telle action qu'elle jugera nécessaire, y compris l'emploi de la force armée, pour rétablir et assurer la sécurité dans la région de l'Atlantique Nord." 

C'est le principe même de la défense collective: une attaque contre l'un des membres est une attaque contre tous les autres.

Cet Article 5 n'a été invoqué qu'une seule fois dans l'histoire de l'OTAN: le 12 septembre 2001 par les Etats-Unis, soit le lendemain même du tragique attentat contre les tours du WTC à New-York. Les 19 (à l'époque) pays membres manifestèrent aussitôt leur entière solidarité envers les Etats-Unis. Ils déclarèrent que l’attaque contre les Etats-Unis était une attaque dirigée contre eux tous et s’engagèrent à aider les Etats-Unis en prenant les mesures jugées nécessaires (c'est ainsi que la France décida l'envoi de troupes en Afghanistan).

Dans la situation à laquelle se trouve confrontée aujourd'hui l'Ukraine, si elle avait été membre de l'OTAN, elle aurait pu activer cet Article 5 pour demander un soutien militaire aux 29 autres pays membres.

Les Opérations menées par l'OTAN

Bien que l'OTAN ait été, tout au long de la Guerre Froide, opposée au Pacte de Varsovie et ait mené des exercices militaires conjoints, aucune opération militaire n'a eu lieu dans ce contexte-là. Au début des années 1990, l'Alliance a été donc conduite à prendre de nouvelles responsabilités au sein de la communauté internationale: tout d'abord à des fins défensives (son but initial), puis à des fins humanitaires et en troisième lieu à des fins de réponses à des crises. Les interventions de l'OTAN ont toujours été déclenchées soit après invocation des Articles 4 ou 5 du Traité de l'Atlantique Nord, soit sous mandat de l'ONU. 

Voici une brève description de ces différentes interventions:

• Bosnie (juillet 1992-décembre 2004)

Intervention militaire de l'OTAN durant plusieurs années, sur mandat de l'ONU (Résolutions 713, 757, 816 et 836): blocus naval, zone d'exclusion aérienne, campagne aérienne et maintien de l'ordre. Déploiement de l'IFOR (Implementation Force) forte de 60 000 hommes, suivi par celui de la SFOR (Stabilization Force), pour instaurer des conditions de sûreté et de sécurité de nature à favoriser la reconstruction civile et politique du pays.

• Serbie et Kosovo (mars 1999 à aujourd’hui)

Intervention militaire de l'OTAN sur mandat de l'ONU (Résolution 1244): campagne aérienne et maintien de la paix. Déploiement de la KFOR (Force pour le Kosovo) pour mettre fin à la violence généralisée et à la catastrophe humanitaire.

• Afghanistan (décembre 2001-décembre 2014)

Opération déjà mentionnée dans le paragraphe précédent (unique cas de l'invocation de l'Article 5). Suite à la Résolution 1386 du Conseil de Sécurité des Nations Unies (20 décembre 2001), envoi de la FIAS (Force Internationale d'Assistance à la Sécurité). Cette coalition multinationale, dirigée par l'OTAN, visait à faire respecter la paix en Afghanistan. A ce jour, cette mission de l’OTAN en Afghanistan constitue l’engagement opérationnel le plus important de l’Alliance, avec plus de 16 000 effectifs sur le théâtre des opérations.

• Pakistan (octobre 2005-février 2006)

L'OTAN assume une nouvelle responsabilité (dans l'après-Guerre Froide), en fournissant une aide au Cachemire (Pakistan) suite au tremblement de terre qui avait frappé le pays en 2005. L'une des plus importantes missions de l'OTAN, cette fois-ci sous forme d’aide humanitaire et à la demande de ce pays: ponts aériens depuis l'Allemagne et la Turquie (3 500 tonnes de fournitures transportées), déploiement de professionnels aguerris (Ingénieurs, Unités médicales) et de matériels spécialisés. 

• Golfe d'Aden/Océan Indien (octobre 2008-décembre 2016)

A la demande du Secrétaire Général de l’ONU, envoi de navires de guerre de l'OTAN pour contrer le problème croissant de la piraterie au large de la Corne de l'Afrique. Cela se traduira par la réalisation de trois opérations consécutives: Allied Provider (octobre à décembre 2008), Allied Protector (mars à août 2009) et Ocean Shield (septembre 2009 à décembre 2016).

• Libye (mars 2011-octobre 2011)

Sous mandat de l'ONU (Résolution 1973), l'OTAN lance l'OUP (Operation Unified Protector) dans le but de faire respecter un embargo sur les armes, d'imposer une zone d’exclusion arienne et d'assurer la protection des populations/zones civiles confrontées à des attaques en Libye. 

• Turquie (mars 2003)

Suite à une demande de la Turquie (invocation de l'Article 4 du Traité de l'Atlantique Nord) pour se protéger des missiles irakiens (2), l'OTAN déploya plusieurs batteries de missiles PATRIOT américains envoyées depuis les Pays-Bas.

• Afghanistan (janvier 2015-août 2021)

Déroulement de la RSM (Resolute Support Mission), avec la participation de milliers de membres du personnel de l'OTAN et de pays partenaires en Afghanistan, pour fournir une formation, des conseils et une assistance aux forces et aux institutions de sécurité 

afghanes, afin de combattre le terrorisme et de sécuriser le pays.

Processus d'adhésion à l'OTAN

Ce processus d'adhésion est régi par l'Article 10 du Traité de l'Atlantique Nord, lequel limite les futurs membres aux seuls "États Européens". Les pays qui souhaitent adhérer doivent satisfaire à certaines exigences et mener à bien un processus impliquant le dialogue politique et l'intégration militaire. 

Ce processus d'adhésion est supervisé par le Conseil de l'Atlantique Nord, organe directeur de l'OTAN. Il est particulièrement long, jusqu'à plusieurs années et là-encore doit être approuvé par l'unanimité des membres ... 

Le côté "Bouclier" de l'OTAN

Conçue pour faire face au Pacte de Varsovie, lequel a été dissous le 1er juillet 1991, l'OTAN a eu beaucoup de mal à justifier la poursuite de ses activités. Son rôle n'était plus compris et on parlait même de "mort cérébrale" à son égard.

Tout cela a été remis en question avec la très récente invasion de l'Ukraine par la Russie. Le nom de l'OTAN est de nouveau sur toutes les lèvres. Les pays qui en sont membres s'en félicitent et considèrent cela comme une bénédiction. Dans d'autres, les opinions publiques sont désormais nettement en faveur d'une adhésion (cas de la Finlande et de la Suède).

Le monde est particulièrement inquiet et des millions de gens voient plus que jamais en l'OTAN un réel "bouclier" face à une éventuelle dérive.

Dans l'immédiat, il est urgent que la tragédie vécue actuellement 

par les Ukrainiens prenne fin le plus vite possible ...  

 

Sources diverses
Qu'est-ce que l'OTAN ? (Site Officiel de l'OTAN)	Cliquer ICI
Organisation du traité de l'Atlantique Nord (Wikipédia)	Cliquer ICI
Au fait, c'est quoi l'OTAN ?	Cliquer ICI
5 choses à savoir sur l'OTAN	Cliquer ICI

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(1) : C'est ainsi que l’Alliance Atlantique occupa initialement des locaux temporaires au Palais de Chaillot, en attendant la construction d'un bâtiment définitif sur un terrain porte Dauphine offert par la France en 1954. C'est là que sera bâti le Palais de l’OTAN, entre 1955 et 1957, sur les plans de l'architecte Jacques Carlu. L'Organisation s'y installera en 1959 et y restera jusqu'en 1966. 

(2) : Cela dans le cadre de la campagne menée contre l'Iraq, en mars 2003, par une coalition de forces de différents pays (dont certains appartenaient à l'OTAN).

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